Michel Glémarec, un océanographe précurseur !
Dans la nuit du 16 mars 1978, la tempête fait rage en mer d'Iroise. L’Amoco-Cadiz, un pétrolier en panne hydraulique de gouvernail, s'échoue sur les hauts fonds de Portsall. En quelques heures, ce géant des mers éventré, se coupe en deux et libère peu à peu ses 220 000 tonnes de brut iranien en provenance du golfe persique. Après des heures d'efforts en vol stationnaire à 30 pieds d'altitude et en hélitreuillage de nuit, 46 personnes sont sauvées par les équipages des premiers Superfrelons de sauvetage SAR, numéro 112 et 148 indicatifs Belligou Alfa et Kilo en service à la Base Aéronavale de Lanvéoc. Resté dans les annales du sauvetage en mer aéronautique comme un exploit technique et humain, l'échouage de l'Amoco-Cadiz est aussi la plus grande catastrophe écologique observée sur les côtes bretonnes.
Expert en écologie marine, Michel Glémarec participe à l'expertise et au procès de Chicago en 1982. Quatre ans de procédures permettront d’obtenir, fait exceptionnel, une indemnisation des communes littorales concernées. Spécialiste de l'exploration abyssale, dans la première partie de sa carrière, Michel Glémarec, docteur en océanographie biologique est aussi spécialiste de la biodiversité littorale Bretonne. Créateur du laboratoire d'océanographie biologique associé au CNRS, le professeur Michel Glémarec exerce jusqu'en 1999 au sein de l'Université de Bretagne occidentale. Cet océanographe de renom a inspiré de nombreux étudiants comme Eric Hussenot et Jean-Paul Alayse, fondateurs et gestionnaires avec Brest'aim du Centre de Culture Scientifique, Techniques et Industrielle, Océanopolis à Brest. Rompu aux campagnes en haute mer sur des navires de la flotte océanographique tel le Jean Charcot, à la conception et la création d'outils de recherche telle une drague sur mesure pour collecter et étudier les espèces benthiques par exemple, Michel Glémarec, est aussi troublé par le lien entre l'art et la science depuis son origine.
Adepte de l'observation sur le terrain, il découvre dans les dessins gouaches, toiles naturalistes de Mathurin Méheut, une mise en valeur et une description figurative du concept de biodiversité littorale bretonne notamment. Amateur d'art, il se passionne pour cette œuvre originale et étudie l'importance de la science pour l'artiste et révélant parfois ses clins d'œil, voire sa fantaisie. La biodiversité littorale paru aux Ed le Télégramme, crée l'événement en 2010 démontrant un lien fort entre l'art figuratif et l’étude de la biologie marine. Réédité pour la troisième fois chez Locus Solus cette fois, ce livre a pour ambition de faire découvrir non seulement la biodiversité littorale mais aussi une partie de l'oeuvre du peintre Mathurin Méheut qui en 1913 lui permis de réaliser les deux volumes de sa célèbre étude de la mer. Travaillant sur le motif sans relâche, l'artiste laisse une œuvre forte sensible fournie et très éclectique. Son esprit de synthèse et sa virtuosité lui confère une écriture personnelle reconnaissable entre toutes. Son œil et sa main interprètent et restituent une réalité naturelle et vivante…
Michel Glémarec décrypte avec finesse et sobriété l'attractivité du milieu marin sur ce peintre de la marine rendu célèbre par une centaine d'expositions organisée par son amie peintre, Yvonne Jean Haffen, conservatrice du musée de Lamballe, de l'année de sa disparition en 1958 à 1996.
© Eric Berthou